Parti Ouvrier Indépendant - Fédération 67 (Strasbourg Schiltigheim Haguenau Brumath Saverne Obernai…)
 







Accès à l'Espace Adhérents

Accueil du site > Analyses & Histoire > Du Conseil territorial à la Collectivité européenne d’Alsace !

À paraître dans dans Résistances Communistes n° 133

Du Conseil territorial à la Collectivité européenne d’Alsace !

jeudi 17 décembre 2020

Dans le numéro 88 de mai-juin 2013 nous avions publié un article titré : « Conseil territorial d’Alsace : ils ont perdu ! ». Dans cet article il était, entre autre, expliqué comment malgré toutes les ficelles employées par les autorités, le projet avait été rejeté, refusé et retoqué par la population des deux départements, Bas-Rhin et Haut-Rhin, par 79,84 % des inscrits lors de la consultation référendaire du 7 avril de la même année.
Or, alors que le résultat était connu et acté, une fois de plus, le pouvoir fait fi du résultat et ce faisant, à compter du 1er janvier 2021 une “Collectivité européenne d’Alsace” verra le jour.
On change le nom et on ressert le même vieux brouet. La même méthode avait déjà été utilisée après le rejet par les électeurs du Traité constitutionnel européen en 2005, en le remplaçant par son clone le Traité de Lisbonne de 2007 et, surtout, sans demander avis à qui que ce soit.


Un peu d’histoire :
Les attaques systématiques contre les fondements de l’architecture territoriale républicaine, issue de la Grande Révolution de 1789, ne sont pas récentes et les volontés clairement affichées de recréer une France des régions régies par des baronnies suzeraines étaient déjà à l’ordre du jour lors du référendum de 1969. À l’époque ce référendum, éminemment politique, avait permis d’évacuer le général De Gaulle du pouvoir et à surseoir de plusieurs décennies un vieux projet quasi-monarchiste de remise en place de la France des terroirs, des provinces, du patrimoine ancestral, en définitive d’une gestion millénariste d’une France conservatrice.
Mais le pouvoir réactionnaire a la mémoire sélective et comme le prétend l’expression “La vengeance est un plat qui se mange froid”, il veut, maintenant, sous la gestion de LREM, se repaître de “leurs biens” pour en profiter un maximum avant qu’il ne soit trop tard. À ce stade un repère chronologique semble nécessaire à une meilleure compréhension :

31 juillet 2002 : le gouvernement Chirac-Raffarin, à la faveur d’une décision du conseil des ministres “expérimentait” : « la gestion des fonds structurels européens. »

22 octobre 2008 : Le comité « Balladur » est chargé, par Nicolas Sarkozy, de réduire le mille-feuille territorial et ainsi de dégager des économies. Balladur prône « l’évaporation des départements » (dans les régions) et des communes au sein des intercommunalités.

10 janvier 2010 : En Guyane et Martinique, référendum sur l’autonomie et large victoire du non.
Il avait été décidé en Guyane courant 2009 à la suite de la grève générale aux Antilles en début d’année. Cette consultation proposait une autonomie accrue, en passant sous le statut de collectivité d’outre-mer au lieu de celui de région.

Réforme des collectivités territoriales : La loi de décembre 2010 met en place les conditions de la fusion de collectivités dans un territoire, désormais : « Une région et les départements qui la composent peuvent (…) demander à fusionner en une unique collectivité territoriale. »

Décembre 2010 : Phase d’application de la réforme territoriale : « Le ministre qui pilote le dossier, Philippe Richert (Ministre aux Collectivités) a souligné devant le Conseil des ministres que la refonte de la carte intercommunale est l’une des mesures essentielles de la loi sur la réforme territoriale publiée le 17 décembre au Journal officiel. » (AFP)

1er décembre 2011 : Les conseillers généraux et régionaux 67 et 68, réunis en congrès extraordinaire à Colmar (Haut-Rhin), ont voté à une très large majorité en faveur de la création inédite d’une collectivité territoriale unique à l’horizon de 2014, le Conseil d’Alsace (1 contre - 19 abstentions - 101 pour). Au programme, des transferts de compétences : les programmes scolaires ; la totalité du réseau routier et des compétences réglementaires dans le droit du travail afin de gagner en compétitivité face aux voisins allemands ou suisses.

Mars 2012 à Dijon : François Hollande : « Aux régions le développement économique, l’aménagement du territoire, les transports publics, la formation, bref la préparation de l’avenir. Elles doivent-être parties prenantes des politiques de l’emploi, pleinement associées à la gestion de la Banque publique d’investissement que nous allons créer et aux financements pour les PME, pour l’innovation, pour l’économie sociale et solidaire. Des compétences leur seront reconnues en matière d’investissement dans l’enseignement supérieur et dans la recherche. Elles doivent aussi pouvoir disposer d’un pouvoir réglementaire leur permettant d’adapter la loi nationale aux réalités du territoire (…) ».

Juin 2012 : Le président de la région Alsace, Philippe Richert est reçu par la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la Fonction publique, Marylise Lebranchu (PS) qui lui annonce que le gouvernement n’entraverait pas le projet de Conseil unique d’Alsace.
Un communiqué de la région Alsace déclare que l’État engagerait une réflexion sur la possibilité de nouveaux transferts de compétences aux collectivités territoriales.

24 novembre 2012 : Les conseillers régionaux et généraux à nouveau réunis en congrès entérinent la création d’une collectivité territoriale d’Alsace, rassemblant en une entité unique le Conseil régional d’Alsace et les Conseils généraux des Bas-Rhin et Haut-Rhin. À cette occasion les écologistes, le FN, l’UMP et une partie des conseillers PS ont voté favorablement à ce projet.

Dans le même temps, il est nécessaire de se rappeler les attaques incessantes contre les collectivités territoriales et les fonctions publiques. En 2010 Sarkozy fait promulguer la loi de réforme des collectivités territoriales (RGPP/REATE). Il met, aussi, en place la réduction du nombre de collectivités et la contractualisation des politiques publiques par la fusion des collectivités, les délégations de compétences (public/privé) et la mutualisation des services. Il met également en place la réforme de la taxe professionnelle qui réduit les capacités financières des collectivités territoriales.

Entre 2014 et 2016 Hollande poursuit le détricotage avec la loi MAPTAM, les communes nouvelles, la fusion des régions, la loi NOTRe. Autrement dit, les concentrations, fusions, métropolisation et régionalisation accompagnées du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) et du pacte de Responsabilité remettent en cause le principe de solidarité nationale vers les collectivités territoriales.
De plus, il faut rappeler qu’en 2018 le gouvernement Macron-Philippe fait voter la loi de transformation de la Fonction publique avec en corollaire la mort programmée du statut de fonctionnaire. On y retrouve, encore et toujours, non seulement les substantifs différenciation, expérimentations, décentralisation, mais aussi leurs mises en application. Après la réforme de la taxe professionnelle, la mise en place de Réforme de la taxe d’habitation est une nouvelle réduction de l’autonomie financière des Conseils territoriaux.

Aujourd’hui, les départements sont vraiment menacés de suppressions, de rattachements à des régions limitrophes, à des regroupements à statuts particuliers. L’action publique peut être démembrée ou externalisée avec des mutualisations et des regroupements à la carte. Il y a de moins en moins de Services publics dans les Collectivités territoriales, mais de plus en plus de structures semi-privées, privées ou en voie de privatisation des SEM, des SEMOP, des SPL, des MSAP, des agences de ci et de ça, des EPA, des EPIC et bien sûr des EPCI et tous ces montages peuvent se regrouper, fusionner, se séparer et se retrouver. Nos énarques jamais en manque d’imagination ont tendance à nommer tout cela, la simplification de la vie publique, la déstructuration du soi-disant mille-feuille institutionnel.


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace adhérents | Espace privé | SPIP | Debian Debian | XAMPP XAMPP | squelette