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« Nous revenons ! »

Paru dans Résistances Communistes n° 129

mercredi 11 mars 2020, par Serge BLOCH


La commune de Paris :

L’histoire de la Commune de Paris, mal ou peu apprise dans nos établissements scolaires, est restée profondément ancrée dans la mémoire collective des militants se revendiquant de la classe ouvrière, qu’ils soient syndicaux ou politiques.
Les assassins de la Commune de Paris, les Mac Mahon, les Adolphe Thiers, le Général de Galliffet surnommé le “Marquis aux talons rouges”, se distinguèrent par leur férocité envers les insurgés au nom de leur liberté reconquise.

Un jour, Galliffet, en regardant passer les prisonniers communards se dirigeant sur Versailles, la badine à la main, sélectionne ses victimes d’une manière absolument arbitraire, sur leur mine. Il ordonne : “que ceux qui ont des cheveux gris sortent des rangs !”. 111 captifs s’avancent. “Vous, vous avez vu juin 1848, vous êtes plus coupables que les autres !”. Il les fait mitrailler dans les fossés des fortifications. On estime à 3000 le nombre de ses victimes, car il s’octroyait un droit de vie ou de mort ; selon son bon plaisir, il prélevait sur les convois de prisonniers la dîme du sang. Ses victimes étaient choisies de préférence parmi les vieillards ou les blessés.

Une phrase de Thiers est restée célèbre ; elle figure dans sa circulaire du 26 mai 1871 « à toutes les autorités civiles et militaires » : « Le sol de Paris est jonché de cadavres. Ce spectacle affreux servira de leçons. » De « leçon » pour qui ? « Pour les insensés qui oseraient (encore) se déclarer partisans de la Commune. Vingt ou trente mille morts, quarante mille arrestations, le poteau de Satory (« notre crucifix à nous », dira Vallès), les pontons, la déportation, le bagne, de quoi rassurer les « honnêtes gens ». Mais les honnêtes gens ne se sentent toujours pas tranquilles. Thiers a beau leur jurer qu’« après la défaite que la révolution vient d’essuyer, jamais plus, j’en suis certain, la société ne connaîtrait une alerte semblable. » Or, la bourgeoisie n’est toujours pas satisfaite, Edmond de Goncourt écrit : « Mr Thiers (…) est un sauveur de la société à bien courte échéance (…) Du dilatoire, de la temporisation, de l’habileté, de la filouterie », voilà ses méthodes, alors que, ce qu’il faut, ce sont de « grandes mesures et un remaniement des institutions », et la première de ces « grandes mesures » aurait dû être l’abolition du suffrage universel (…) et l’on n’a pas touché à ce stupide système par quoi l’ignorance de la vil multitude gouverne. » L’écrivain Renan, toujours angoissé, confia à la princesse Julie : « l’émeute est domptée », soit, mais « le mal est encore plus profond qu’on ne le suppose » ; le mal dit-il est dans la moelle du peuple : « la haine, l’envie. » Deux derniers exemples de ce que fût le déchaînement zélé de la réaction en cet automne 1871 : le lieutenant-colonel Hennebert s’écriait : « Quoi qu’en puissent penser les âmes tendres, nous devons dès à présent, frapper de terreur les hordes de bandits ; » il faut « un ministère de la Police qui surveille activement les coins les plus cachés de la France », « abolissons cette littérature malsaine qui commence aux Misérables de M. Hugo ». « Honorons le soldat et prions ». De son côté, le général Temple disait à Jules Simon, le 11 septembre, à quel point la situation était simple : il n’y avait plus en France que « deux partis (…) « d’un côté les honnêtes gens, de l’autre les gens de la commune et leurs souteneurs » (…) « entre les deux groupes, les seuls rapports concevables sont ceux que peuvent entretenir un président de cour d’assises et un assassin. » Il reste, à la lecture de ces textes au gouvernement Macron-Philippe-Castaner de la marge et ils le savent.

L’épopée de la Commune fut sanglante ! Mais c’est à la haine des « honnêtes gens » et à la rage des possédants que l’on doit le massacre. De ceux qui réclament une bonne leçon au peuple pour s’être élevé contre « les gens de biens, les amis du trône, de l’autel et de la banque ». Vœu pieux que s’empresse d’exaucer Versailles en procédant à 30 000 exécutions sommaires. Pour l’exemple. En une seule semaine.

De son côté, Karl Marx, décrivant le 18 mars, écrivit : « La grande mesure sociale de la Commune fut d’avoir posé en acte sa propre existence. »[1] Puis, écrivant à Kugelmann, le 17 avril : « Quelle que soit l’issue de l’aventure qui se déroule à Paris, elle constitue un nouveau point de départ, d’une importance historique universelle. »

En 1881, dans la préface écrite pour le livre de Benoît Malon, Le nouveau parti, Jules Vallès écrivait : « Peut-être a-t-il fallu la série des insurrections vaincues, le feu des guerres civiles, pour éclairer la pensée des faubourgs ! Mais de même qu’à travers les trous d’un drapeau sali par le combat et déchiqueté par les balles, passe le soleil, de même à travers la douleur des défaites, l’idée se glisse et flambe, et le malheur a fait l’éducation des foules. »

Nous pourrions, évidemment, poursuivre cette terrible énumération, de drames, de crimes et de répressions commis par l’ensemble des autorités au pouvoir et ceci à toutes les époques de notre histoire. L’objectif étant de poursuivre la réflexion sur le continuum dans les démarches des pouvoirs fébriles et en pleine décomposition, afin de tenter de mieux comprendre la violence d’État qui s’est abattue sur le mouvement des Gilets jaunes et sur l’ensemble de la classe ouvrière.

P.-S.

Bibliographie :

Ross DOMONEY.- A story of police violence in France. The Guardian

Henri GUILLEMIN.- Réflexions sur la Commune. Ed. Gallimard, 1971

Louise MICHEL.- A mes frères. Ed. Libertalia, 2019

Jean-Paul MARAT.- Le Peuple forge ses fers. Berg International, 2015

DOMMANGET.- La Commune de Paris de 1871 ; Tome III, La Répression. Ed. Lefeuvre, 1947

Notes

[1] Discours de Marx, octobre 1871, pour le septième anniversaire de l’Internationale


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